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Films Noirs
3 novembre 2014

Le virage du diable (The Devil's Hairpin)

 

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Depuis deux ans, l'ancien champion de course automobile Nick Jargin a pris sa retraite en ayant réussi à rester invaincu en course. Avec ses gains et grâce à un prêt de son ancien directeur d'écurie, il a ouvert une discothèque dans laquelle il emploie nombre de ses anciens adversaires dont certains portent les séquelles d'accidents de course dont Jargin avait parfois été le responsable, y compris son propre frère que Nick avait envoyé dans le ravin bordant un circuit Californien. Un chroniqueur sportif manipulé par l'ancien directeur de course de Nick qui a maintenant dans son écurie le nouveau champion du monde, va tenter de le forcer à reprendre la piste…

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The Devil's Hairpin était le 2ème film réalisé par Cornel Wilde et le 3ème produit par Theodora productions, la société crée avec son épouse Jean Wallace. Comme il a également co-écrit le scénario, co-signé une des deux chansons et qu'il y tenait bien sûr le rôle principal, on peut parler d'un film de Cornel Wilde ! Après La proie nue (qui est son meilleur film) et Le sable était rouge, c'est l'un des meilleurs films de Wilde en tant que metteur en scène. Celui ci est en tout cas dépourvu de certaines grosses maladresses de mise en scène qui parsèment la plupart de ses films (sauf son meilleur). L'intérêt de celui ci réside surtout dans "l'étude" de la psychologie complexe d'un champion qu'il propose. On ne voit rien de révolutionnaire mais Wilde livre ce portrait sans complaisances malgré quelques ficelles dramatiques plus ou moins attendues que l'on peut regretter surtout dans ce qui est montré des relations entre le grand sportif et sa famille, en l'occurrence son frère et sa mère et l'origine de ces conflits plus ou moins ouverts et avoués.

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Si Cornel Wilde tenait dans Storm Fear, le premier film qu'il avait réalisé, le rôle du méchant, laissant le "beau rôle" à Dan Duryea, intervertissant donc leurs emplois habituels pour un pari selon moi très peu payant, son personnage à peine moins antipathique dans Le virage du diable est beaucoup plus intéressant. C'est la personnalité complexe de Nick qui est le centre d'intérêt principal de ce film. Cornel Wilde y joue sur deux registres, un habituel : le charme, le sourire, la désinvolture, l'humour. Ses scènes avec Jean Wallace sont toujours aussi charmantes et elle-même toujours aussi sexy, bien aidée ici par les robes et tenues diverses (dont un mini short blanc bien sympa) conçus par Edith Head mais derrière cette façade désinvolte se cache un récit plus sombre qu'il n'y parait, l'habilité du scénario permettant de nous faire prendre conscience relativement lentement de cette face sombre du personnage alors qu'elles étaient là sous nos yeux.

On a d'abord l'impression d'avoir affaire à une forte personnalité, un homme flamboyant et immensément populaire que la réussite sportive puis la reconversion réussis ont comblé. Mais progressivement, sa propre attitude, le jugement parfois sévère exprimé par d'autres, les explications sur son passé fournies par les témoins de sa vie, par ses proches, ses anciens adversaires et par sa mère, vont permettre de prendre plus nettement conscience de la profonde dureté du personnage et de son égocentrisme maladif…en même temps que lui-même en prendra conscience ce qui le mettra "en bout de course" et même "in-extremis" sur la voie du rachat…et ceci très concrètement puisque sa métamorphose se traduira en actes dans les seules séquences qui finalement appartiennent au cinéma d'action puisque c'est dans un long épilogue d'une dizaine de minutes que l'on voit les seules séquences de course automobile. Avant cela, on aura vu cet homme aveuglé par son immense popularité écraser son entourage comme il écrasait jadis tous ses adversaires sur la piste, y compris son propre frère (et même surtout son propre frère). Il a poursuivi d'ailleurs au delà de sa carrière une relation fondée sur la domination d'autrui car il a gardé sous ses yeux, sous couvert d'aider à leurs reconversions et de se racheter, ses victimes de la piste, les ex adversaires qu'il continue d'humilier sans même s'en rendre compte, clamant à la foule de ses admirateurs qui réclament son retour et font pression pour que Nick relève le défi lancé par ses ennemis : " Regardez ce que sont devenu les hommes qui ont voulu me défier ! ".

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En dehors de ses admirateurs qui souhaitent sans arrières pensées le retour d'un grand champion, il y a ceux qui intriguent : un chroniqueur sportif (et à sa suite les reporters sportifs de la télévision) et surtout la foule des envieux qui voudraient voir chuter l'idole. Celui chez qui le ressentiment est le plus fort, c'est Danny Rhinegold (Arthur Franz), l'ancien directeur d'écurie de Nick qui tient absolument à ce qu'il revienne sur sa décision pourtant maintes fois réitérées de ne jamais revenir en course, pour montrer à l'arrogant ex champion qu'il ne s'est pas fait tout seul et qu'il est capable de façonner un champion encore meilleur qu'il ne l'a jamais été, le nouveau champion du monde qui court aussi pour lui, Tony Boari. La confrontation inévitable à la fois sur la piste et avec son propre passé aura lieu et on le sait d'emblée puisque le film débute par une courte scène montrant l'avant course qui va clôturer le film, toute l'histoire étant racontée en un long flash-back qui s'arrête sur le départ de la course finale. Ceux qui aiment les courses de bagnoles, en l'occurrence de voitures vintage, vont être déçu car comme je l'ai dit l'unique course automobile qui va donner l'occasion à Nick Jargin de se racheter n'intervient que dans l'épilogue du film mais cette séquence dure une dizaine de minutes. "L'épingle à cheveux du diable" du titre original, le virage du même nom de la version française est un gros symbole mais le final offre quelques rebondissements sympas et les séquences de course sont très bien filmées. Est ce que rien ne doit venir entraver la soif de victoires d'un grand champion, Cornel Wilde répond que non (ouf…). Les quelques films qu'il a réalisé dans les années 50, notamment celui ci ainsi que Maracaibo ont été largement bénéficiaires alors je ne sais pas pourquoi il a mis cette carrière là entre parenthèse pendant 5 ans, ne retournant à la réalisation qu'en 1963 pour Lancelot, chevalier de la reine. vu en VF

 

Avec : Cornel Wilde (Nick Jargin), Jean Wallace (Kelly James), Arthur Franz (Danny Rhinegold), Mary Astor (Mme Jargin), Paul Fix (Doc Addams)

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Commentaires
G
Je considère "Ligne Rouge 7000" comme un mauvais Hawks, ce qui nous donne tout de même un film regardable mais pas plus. "Le destin est au tournant" n'est pas un film de bagnoles mais un film noir dans lequel un trajet et/ou une poursuite en voitures revêt une grande importance comme dans "À bout portant" de Siegel par exemple mais ni plus ni moins que dans d'autres films noirs ne se déroulant pas du tout -même en arrière plan- dans le milieu de la course automobile. <br /> <br /> <br /> <br /> Ensuite ce qui serait constitutif du coté conventionnel de ces films de bagnoles : les scènes d'action "dans l'arène" ; le suspense, etc…ne s'applique absolument pas à ce film de Cornel Wilde puisque les scènes "en course" interviennent dans les 10 dernières minutes. Tout le reste c'est du drame "en chambre". D'autre part, je me moque éperdument des trucages que vous déplorez. Tout dépend comment c'est fait. Hitch. faisait beaucoup joujou avec ce genre de choses et c'est critiquable ? <br /> <br /> <br /> <br /> Enfin, je suis absolument d'accord avec ce que vous dites au sujet du film de Clarence Brown…mais mon sujet c'était le film de Cornel Wilde. Quand je doit parler d'un film…je ne parle pas d'un autre, fusse-t-il la référence du genre (ce que n'est tout de même pas le film de Brown.
J
Les films des années 50 et la décennie d' après qui ont pour toile de fond les courses automobiles sont bien souvent archi-conventionnels pour la plupart et calqués sur les mêmes recettes éprouvées voire éculées à qques exceptions près (red line 7000, le destin est au tournant) . On est en circuit fermé en quelque sorte et forcément on finit par tourner en rond. L'usage intensif des transparences et de la rétro-projection émoussent notre intérêt pour une course reléguée à n'être qu'un succédané, un ersatz.. Ce sont des péplums des temps modernes avec ces archétypes que sont les coureurs qui s'affrontent comme des gladiateurs et le runway pour l'arène . Côté suspense, difficile de faire mieux que la course de chars ds Benhur . Le" virage du diable" n'échappe pas à tous les poncifs manichéens et ne mérite pas qu'on s'y attarde. Par hasard, j'ai revu récemment "to please the lady" (Clarence Brown (1950) et franchement, c'est un cran au-dessus. Et pourtant,le canevas est classique: évincé par une femme de tête, journaliste de renom,( Barbara Stanwick), le héros coureur automobile et coureur de jupons (Clark Gable) n'aura de cesse de démentir ses chroniques incendiaires pour la conquérir en remportant course sur course; se refaisant par là même une réputation sérieusement entachée par la belle. L'intérêt du film ne réside pas seulement là mais surtout dans la maestria du réalisateur, particulièrement ds le morceau de bravoure de la fin du film tourné in situ à Indianapolis où la course et ses péripéties étayées par tous les à-côtés techniques occupent le devant de la scène et nous tiennent en haleine jusqu'à la fin. Les plans de coupe documentés sur "les petits bras" de la course à l'oeuvre et les bolides courant pour de vrai donnent son tour d'écrou à l'histoire.
Films Noirs
  • Critique des films noirs du cinéma américain entre 1940 et 1960. + cinéma "policier" au sens large. Le principe : Un court résumé du film pour situer l'action et les personnages, puis mise en avant des points singuliers du film, bons et/ou mauvais.
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