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Films Noirs
25 juillet 2015

Les échappés du néant - Back from Eternity. John Farrow (1956)

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Produit et réalisé par John Farrow / Scénario : Jonathan Latimer d'après une histoire de Richard Carroll / Image : William C. Mellor / Musique : Franz Waxman (RKO) 

Avec Robert Ryan (Bill Lonagan), Anita Ekberg (Rena), Rod Steiger (Vasquel), Keith Andes (Joe Brooks), Gene barry (Ellis), Phyllis Kirk (Louise), Beulah Bondi (Mme Spangler) 

Un avion de ligne transportant  7 passagers et  3 membres d'équipage  vers le Brésil est pris dans un terrible orage, connait une avarie de moteur  puis voit une de ses portes voler en éclat  ce qui entraine la mort de l'hôtesse du vol happée par le vide. Il est donc contraint d'atterrir en catastrophe dans une clairière cernée par la jungle. Tout le monde s'en sort mais d'emblée la  discorde s'installe dans le groupe. Crimp, un chasseur de primes et Ellis, un homme d'affaires, paniqués par la situation précaire des survivants, contestent l'autorité du commandant de bord qu'ils rendent responsable du crash, mais celui ci parvient tout de même à restaurer son autorité et à organiser la vie quotidienne des rescapés. Malgré la complexité de l'opération, il tente avec l'aide des passagers de réparer l'avion endommagé lors de l'atterrissage. Un vieux professeur en retraite et un sud-américain connaissant la région et qui avaient tout deux évoqué la présence dans les parages de tribus d'indiens Jivaro, des chasseurs de têtes redoutables, remarquent les traces de leur présence à proximité de la clairière. Bientôt il devient évident qu'il s'apprêtent à attaquer. Un contre la montre commence…

 

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Remake, par moments presque à l'identique, d'un premier film déjà tourné par John Farrow en 1939, Quels seront les cinq ? (Five Came Back). Les deux films appartiennent à la fois au film catastrophe, au thriller et au film d'aventures du genre survival. Ils  ont tous les deux leurs mérites, le remake plus long de 25 minutes permet tout de même de bien mieux caractériser les principaux personnages qui ont une épaisseur que l'on aurait du mal à retrouver dans les autres films comparables de cette époque et à ce titre on pourrait le qualifier de film d'aventures "psychologique". Ces personnages, les voici : Rena (Anita Ekberg) est la première que l'on découvre. C'est une prostituée d'origine européenne qui est rejetée par son souteneur et envoyée vers un bordel du Brésil. Le rôle était tenu par Lucille Ball dans la version de 1939. Ici, le personnage est mieux défini, l'ouverture du film ou elle est clairement montrée comme une entraineuse travaillant dans un "casino" de Las Vegas était même carrément absent du film original. Ensuite on découvre le gangster et tueur à gages Pete Boswik (Jesse White) qui a été chargé d'accompagner le jeune fils d'un patron de la mafia menacé par un gang rival. Puis un jeune couple sur le point de se marier (interprété par Gene Barry et Phyllis Kirk). Un vieux couple sympathique (Cameron Prud'homme et Beulah Bondi). A la première escale, c'est le commandant de bord Lonagan (Robert Ryan)  qui prend les commandes de l'appareil. C'est un pilote très expérimenté et même une légende de l'aviation mais c'est aussi un homme cynique et en perdition qui après avoir été licencié à plusieurs reprises en est venu à travailler pour cette modeste compagnie aérienne. Il a pour copilote Joe Brooks (Keith Andes), un très jeune homme dont c'est l'un des premier vol. Et enfin, au cours de la dernière escale en Californie, 2 passagers inattendus s'ajoutent à cet équipage disparate : Vasquel (Rod Steiger) un criminel qui est escorté  au Brésil pour y être exécuté et son gardien Crimp (Fred Clark) qui est aussi le chasseur de primes qui l'avait capturé.  

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Avant le crash de l'avion en pleine jungle sud-américaine, mais surtout après, on suit avec beaucoup d'intérêt cette assez fine et maline "étude de groupe". On apprend en effet à connaitre assez intimement ces multiples personnages. Leur évolution personnelle et l'évolution des rapports qui s'établissent entre eux seront bien souvent inattendus…et donc finalement pas si surprenant que çà surtout que Farrow et son scénariste prennent presque systématiquement le contrepied de ce que l'on pourrait attendre. Cela dit, ces évolutions ne sont en rien des facilités ou des "trucs" pour justifier des rebondissements artificiels. Au contraire, on apprend au fur et à mesure du récit, par couches successives les éléments biographiques qui éclaircissent les actes des personnages. Si l'on s'attend à la métamorphose du tueur à gages (un peu tendre) qui, privé de patron, finira par s'attacher à l'enfant qu'il avait pris en charge à contrecoeur et qui rendra des services  en raison de son habilité au tir, on sent beaucoup moins venir l'évolution du personnage joué par Rod Steiger qui est absolument remarquable et d'une sobriété rare dans le rôle du criminel. C'est la personnalité la plus complexe du groupe et le personnage clé du récit. A l'inverse, parcours semé d'embuches pour certains "bons" qui face au danger se révèleront égoïstes et lâches. Enfin, c'est à nouveau l'enfant qui sera le révélateur de la véritable personnalité des deux jeunes femmes sans que l'on ai jamais droit aux scènes redoutables et redoutés avec "l'enfant en danger" ou mettant en scène lourdement la découverte de l'instinct maternel. La métamorphose la plus spectaculaire sera évidemment celle de la prostituée interprétée par Anita Ekberg. Lorsqu'elle apparait dans ses robes ultra moulantes, on a peur tant le personnage de vamp ultra caricatural est incongru dans une tel contexte mais si elle ne fait pas oublier Lucille Ball, elle offre ici une assez bonne prestation alors que son rôle est assez nettement plus étoffé et complexe que ce que je connais de sa filmo anglo-américaine…car le rôle est même plus finement développé que celui des habituelles prostituées aux grands coeurs dont le prototype serait celui interprété par Claire Trevor dans Stagecoach.  Robert Ryan semble plus discret mais c'est qu'il nous a habitué à mieux. Pourtant, dans ce rôle du grand homme déchu, il réussit tout de même à placer ses regards exprimant tour à tour la colère ou la douleur et réussit sans peine à assurer son autorité  sans jamais avoir besoin d'élever la voix.  

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Quelques scènes entre Ryan et Ekberg sont d'ailleurs remarquablement dialoguées mais de manière inhabituelle il n'y a pas d'idylles…ou plutôt elles restent à l'état de romances possibles et si la situation sentimentale de certains personnages évolue, c'est montré de manière marginale. Un révolver, l'unique arme  du groupe qui passe de main en main aide à assoir (très) provisoirement un semblant d'autorité mais Farrow s'en sert de manière ironique car les possesseurs successifs ne s'en servent jamais comme on pourrait s'y attendre. Final remarquable d'intelligence et de sobriété. Farrow aurait pu être plus roublard ou tirer sur la corde pour renforcer la force émotionnelle de ces scènes mais il n'en est rien. En revanche, si la situation politique des dictatures sud-américaine est évoquée, cette dimension politique aurait pu être davantage développée et aurait ajoutée une dimension supplémentaire au personnage interprété par Rod Steiger, déjà riche il est vrai. Je n'ai pas dis grand chose des indiens mais c'est que leur présence est quasiment invisible. Une main dans un feuillage.  Des buissons et le feuillage qui s'agite lorsqu'un enfant se pert dans la jungle puis lorsqu'un traitre ose prendre  la fuite. Enfin dans la partie finale, c'est le Tam-Tam devenu omniprésent qui crée une présence/absence angoissante. En revanche, 2 ou 3 fautes de gout à signaler. Notamment une scène de panique invraisemblable qui conduit à une tentative de prise d'otage est totalement ratée et inutile. Elle n'est la que pour justifier le premier changement de main de la seule arme du groupe. Ensuite, Farrow cède une fois au sirène du studio (un mémo de Hughes ?  :P ) et nous offre LA scène sexy inutile et d'ailleurs expédiée sans conviction par Farrow : une bagarre dans l'eau entre les deux filles du groupe. En 1956, c'était déjà la fin de la RKO et il semble bien que Farrow n'ai pas bénéficié de beaucoup de moyens pour tourner ce remake mais il joue plaisamment avec les maquettes notamment pour les deux scènes spectaculaires montrant l'atterrissage puis le décollage au milieu de la jungle. En revanche, la clairière reconstituée dans un coin de studio est un peu cheap.

 

Back From Eternity, c'est le genre de films qui passaient les dimanche après midi dans les années 70 et 80, notamment sur TF1. Je ne le connais qu'en VF mais peut-être a t'il été aussi diffusé en vost sur une autre chaine. Édité dans la collection Warner Archive en zone 1 (apparemment la copie est bonne)

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Films Noirs
  • Critique des films noirs du cinéma américain entre 1940 et 1960. + cinéma "policier" au sens large. Le principe : Un court résumé du film pour situer l'action et les personnages, puis mise en avant des points singuliers du film, bons et/ou mauvais.
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